La poésie animée, Avion Papier
Stéphanie MöckliFesti'neuch, c'est aussi les arts de rue !
Avion Papier
C’est dimanche, 19h25, je titube légèrement de fatigue et de bibine entre les festivaliers. Je dois avouer que ces derniers jours, j’ai un peu tiré sur la corde. Qu’on me pardonne, mais je n’ai plus vraiment 20 ans.
Pour vous donner une petite idée, j’ai failli oublier le rendez-vous que j’avais pris quelques heures plus tôt pour aller voir le spectacle Avion Papier.
19h29, mes pas roulent sur la terre rouge, j’arrive presque en courant, mon badge frappe contre ma poitrine, c’est la journée des familles et dans ma cavalcade, je manque de ramasser un enfant qui passe par là.
J’arrive au bord du lac dans un dérapage contrôlé et je rejoins Eva, ma collègue illustratrice. En moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, je me retrouve catapultée à l’intérieur de la petite caravane bariolée.
Là, nous sommes une quinzaine et c’est tout petit. J’ai des bulles de bière dans la tête qui éclatent, des sursauts de bonne humeur et ma curiosité est piquée à vif. Je ne vois pas très bien comment on pourrait faire une représentation dans un endroit aussi petit.
On s’installe, la porte se ferme, les bruits du festival disparaissent et la magie opère.
Les animations commencent, l’acteur fait des bruitages, tire sur du papier, compose des notes sur un synthé. Une femme miniature apparaît à l’écran. Je l’aime bien cette petite nana, elle m’est sympathique, presque familière. C’est une poursuite, un voyage, une ode délicate.
Une dédicace aux méduses volantes, aux ballons noirs et blancs qu’on imagine multicolores, aux bulles de savon, aux rêveurs à la flûte. Aux départs et aux arrivées, à la solitude et à ceux qu’on croise, mais qui restent là, pour toujours, à portée de coeur.
Il y a les bruits, aussi, du plastique qui créent un bruissement d’aile, un petit squelette qui fait un son de remontée mécanique. Tout ceci se mêle et ça fonctionne, ça fonctionne même très bien.
Car nous sommes tous ces voyageurs, étourdis qui avançons sans guide, qui cherchons une réponse dans un ailleurs, quel qu’il soit.
Ce spectacle nous l’offre, cet ailleurs, ce voyage subtil. Cette mélopée tendre et poétique dans laquelle les rêves se fondent, s’élargissent et finissent par prendre toute la place.
« Avion Papier » c’est la délicatesse du coup de crayon, des animations, une belle histoire avec laquelle on ressort les larmes aux yeux (oui, oui pour de vrai et je ne suis pas la seule à le dire).
Je vous avoue que durant le spectacle, j’ai dégrisé d’un coup. Les petites bulles de bière se sont volatilisées, remplacées par une autre ivresse. Celle de la poésie.
Je suis tellement captivée que je suis allée à la rencontre d’Arthur qui a créé cet univers incroyable pour lui poser quelques questions.
Pourquoi faire les sons vous-même ?
À la base, je suis musicien et j’ai décidé de me calquer sur le cinéma des années 20, quand il n’existait que les images. Cette technique offre une possibilité d’échange avec le public qu’on n’a pas avec un film d’animation classique.
D’où est venue l’idée ?
Au départ, je n’avais fait que les dessins des personnages, des décors et puis, au fur et à mesure, l’histoire est née.
Vous tournez dans toute l’Europe ?
Oui, c’est l’avantage de l’animation muette, il n’y a pas de frontière de langue. Le monde entier peut nous comprendre. Alors on a tourné un peu partout, au Danemark, en Chine, en Corée, en Hongrie, …
Depuis quand tournez-vous avec votre caravane ?
Ça fait maintenant 2 ans et 3 étés…
Des retours particuliers sur le spectacle ?
Beaucoup de personnes le trouvent touchant. Il y a une phrase très belle dans le livre d’or: J’ai été une sardine ravie dans la caravane de la magie.
Pour avoir une petite idée du spectacle, vous pouvez vous rendre sur le Collectif La Méandre.
Illustration : Eva Meister
Stéphanie Möckli