La Reine en scène !
Stéphanie MöckliSaurais-je me montrer objective en vous parlant du concert de Patti Smith ? Je n’en suis pas certaine, car je suis fan d’elle. Fan comme ces gens, un peu fous, que tu aurais pu voir (ou que tu as vus) au concert hier soir.
Et fous, nous l’avons été, fous d’elle, de sa composition, de sa poésie, de ses notes délicates murmurés sur sa guitare, de ses musiciens plus que bons et de son énergie indescriptible. Sensible, rêveuse, bienveillante, mais aussi révoltée. On peut la sentir apaisée, mais toujours rebelle.
Elle arrive sur scène avec une presque nonchalance, à petits pas, sans chichis, se place au micro, nous jette un regard bienveillant et entonne les premières notes du concert. Déjà là, la magie opère. Pour ma part, ce sont ma tête, mes bras, mes jambes, mon coeur et mes nerfs, tout mon corps transformé en tissu-éponge.
Je ramasse des vagues d’émotion. L’océan de crâne qui s’étend devant moi est constitué pour la plupart de cheveux gris. Les gens bondissent, c’est beau ! Beau comme une promesse, comme un voyage au creux de soi-même.
Patti passe d’un état à un autre, tantôt gourou, chamane toute de noir vêtue à celui de fée sensible aux cheveux blancs. Son énergie oscille, elle voltige, elle virevolte, elle ramasse des notes du bout des doigts, fait des envolées lyriques, frappe du pied, se révolte, crie encore, s’use et nous dit haut et fort, qu’il faut se battre pour notre planète, pour notre génération. Car c’est toujours les mêmes sujets qu’à l’époque, les mêmes injustices qui traînent la patte, les mêmes incompréhensions.
Une fois la vague de révolte apaisée, elle dédicace des chansons à ses deux grands amours Robert Mapplethorpe et Fred “Sonic” Smith, mais aussi Jimi Hendrix, Jim Morrison, Allen Ginsberg. Entre autres. Elle fait un clin d’oeil à Midnight Oil qui se produira sous le chapiteau ce samedi en reprenant leur célèbre chanson: “Beds Are Burning”.
Le show continue, elle nous présente son fils Jackson Smith qui joue de la guitare à ses côtés. Puis elle sort des feuilles de papier, pose ses lunettes sur son nez, nous regarde et nous dit: « Maintenant je vous vois, je vous vois tous, même vous là-bas, tout au fond, je vous vois » On sait qu’elle dit vrai, qu’elle nous voit, qu’elle reconnait même tous nos chagrins à la queue leu leu.
Car c’est aussi ça Patti Smith, une musicienne rescapée, une expérience de vie, une preuve que le rock des années 70 n’a pas totalement disparu.
“Because the night belongs to lovers.”
Photo : Tony De Francesco
Stéphanie Möckli